Le peau à peau


Je vous présente quelques  extraits du travail de recherche de Élaine Labrecque, fait dans le cadre de la formation d’accompagnante à la naissance du Centre Pleine Lune. Elle y explique les avantages du peau à peau, méthode de plus en plus populaire, mais dont on ignore encore l’ampleur des bénéfices. Ce texte est aussi disponible sur le blog du Centre Pleine Lune.

Introduction

Quel plus beau moment que celui où on tient notre petit bébé tout neuf dans nos bras, collé contre notre corps. Ce moment où l’on rencontre notre enfant pour la première fois et où on apprend à le connaître. Selon moi, le meilleur moyen de bien profiter de ce moment est bien sur le peau à peau, aussi appelé la méthode kangourou.
Quand j’ai eu mon fils sur mon ventre tout de suite après sa naissance, j’ai ressenti tellement d’amour et de joie pour ce petit trésor, c’était incroyable comme sentiment. Ensuite je l’ai mis au sein tout naturellement sans vraiment savoir si c’était le bon moment ou non, je l’ai fait d’instinct, parce que je croyais que c’était la bonne façon de faire. Je me suis questionné plus tard a savoir pourquoi je m’étais senti ainsi et pourquoi j’avais agis ainsi. C’est en lisant sur le peau à peau que j’ai découvert tout les bienfaits de cette méthode que j’avais utilisé sans vraiment le savoir. J’ai continué à le pratiquer avec le portage pendant plusieurs mois et même encore aujourd’hui avec mon fils de 15 mois.

Qu'est-ce que le peau à peau?

Le peau à peau c’est l’action de placer le bébé nu, directement sur la peau de sa mère et/ou père sans que le bébé ne soit enveloppé d’une couverture. Il est recommandé de le pratiquer tout de suite après la naissance du bébé et ce pour une période de une à deux heures ou plus. On peut par la suite le pratiquer aussi souvent que voulu. Il peut être pratiqué par la mère, par le père, par un membre de la famille ou par tout autre personne significative dans la vie du bébé. S’il est impossible de le pratiquer tout de suite après la naissance, on peut tout de même le pratiquer plus tard.


Un peu d'Histoire

 C’est en 1978 dans une maternité de Bogota en Colombie que le peau à peau a vue le jour. Dans le service de néonatalogie, où le manque de moyens financiers, et donc de couveuses, est un problème quotidien, les soignants ont pris l’habitude de regrouper les petits prématurés, beaucoup trop nombreux. Mais le risque de transmissions infectieuses est grand. C’est alors que l’idée vient au Docteur Edgar Rey Sanabria de déshabiller les nouveau-nés et de les lover contre le torse nu de leurs parents. L’objectif ? Réchauffer ces bébés nés trop tôt, incapables de réguler seuls leur température, et dont la vie est en danger si l’hypothermie se prolonge. Le résultat est édifiant : de façon instantanée, un échange thermique se produit. Par ce corps-à-corps, l’enfant retrouve les 37 degrés dans lesquels il baignait dans le ventre maternel et surtout, sa température reste constante. C’est la naissance des unités kangourou

Bienvenue petit bébé

Le toucher est le sens qui arrive à maturation le premier. Dès la 7ème semaine dans le ventre de sa mère, le petit peut sentir le contact avec ce qui l’entoure. Le tout-petit a donc un besoin vital de contact, de toucher, de tout son corps, pour être en lien direct avec ce qui l’entoure. Le bébé a faim de toucher. Selon Ingrid van den Peereboom, la peau est de loin l’ensemble d’organes le plus important du corps. Un être humain peut vivre aveugle, sourd, et manquer totalement de goût et d’odorat, mais il ne saurait survivre un instant sans les fonctions assurées par la peau 

La pratique du peau a peau tout de suite après la naissance est recommandé par de nombreuses sociétés savantes. On dépose le bébé nu sur le ventre de sa mère (ou père) et on recouvre son dos d’une couverture. On peut laisser le bébé sur le ventre de sa mère pour faire la plupart des soins requis après la naissance, même en cas de césarienne, le bébé peut être laissé sur la poitrine de sa mère pendant que le médecin fait les points de sutures. On devrait laisser le bébé et la mère tranquille pour qu’ils puissent faire connaissance.  L’Organisation mondiale de la santé recommande le peau à peau comme moyen pour lutter contrer l’hypothermie, promouvoir l’allaitement maternel et favoriser les interactions précoces de la mère avec son enfant.

 Selon le Dr Jack Newman dans son livret sur l’importance du peau à peau, il faut comprendre que le petit humain, de même que les autres mammifères, a un habitat naturel ; le contact corporel avec sa mère et/ou son père. En enlevant le bébé de son habitat naturel, des signes physiologiques de stress sont notés. Un bébé qui n’est pas en contact immédiat avec sa mère ou son père enveloppé dans une couverture, sous une lampe chauffante ou dans une couveuse, peut devenir trop endormi ou trop léthargique. Il peut devenir complètement dissocié et pleurer de désespoir. Dans le contact peau à peau, il y a des échanges sensoriels qui vont stimuler et faire apparaître un comportement de bébé ; fouiller et chercher le sein, rester calme, respirer plus naturellement, garder une bonne température corporelle et maintenir un taux de glycémie adéquat. Les bébés ont besoin d’être porté et collé contre leur parent. C’est un besoin et non un caprice. Le petit humain a besoin du contact avec sa mère pour sa sécurité et pour son alimentation

Le peau à peau permet aussi une transition en douceur. « La naissance est une mort à un état pour pouvoir renaître à un autre état, explique Cécile Cortet-Pham. Pour le bébé, c’est le passage forcément brutal du milieu aquatique, dans lequel il vient de passer neuf mois et qui est le seul état qu’il ait connu jusqu’ici, au milieu aérien. En lui permettant de rester en contact avec des sensations connues, par le peau à peau, il est possible de le sécuriser, et de lui permettre ainsi de vivre le plus en douceur possible cette transition. » Difficile d’imaginer à quel point la naissance peut être bouleversante. Mais c’est sans conteste un passage d’un univers à un autre, au cours duquel le nouveau-né découvre pour la toute première fois des perceptions, des ressentis, absolument nouveaux : le froid et le chaud, la faim, le simple fait de respirer… Grâce au peau à peau, et plus encore si celui-ci est pratiqué par sa maman, la rupture est moins violente : son oreille collée contre sa poitrine, il retrouve les battements d’un cœur et le son assourdi d’une voix qui l’ont bercé pendant neuf mois. Avec sa bouche et son nez, il retrouve des goûts et des odeurs qui lui sont familiers. 

Des bénéfices médicaux avérés

Le contact peau à peau procure beaucoup d’effets positifs sur le bébé au niveau médical.

Premièrement, le fait d’être peau à peau contre sa maman stabilise la température du bébé. «La chaleur de la poitrine de la mère peut augmenter ou baisser d’un degré Celsius pour s’adapter à celle de l’enfant, dit la Dre Julie Choquet, médecin de famille au Québec. Le peau à peau peut aussi être pratiqué en cas de fièvre chez le bébé, en dehors du moment de naissance et si la fièvre n’est pas le signe d’une infection grave. En effet, si cette pratique permet de le réchauffer, elle peut également le refroidir. L’excédent de température est alors absorbé par l’adulte.
Ensuite, les recherches ont démontrés que le peau à peau améliore la respiration des nouveau-nés ainsi que leurs rythmes cardiaque et leur glycémie.
De plus, le bébé en peau à peau sera colonisé par les bactéries de sa mère et non pas par toutes les bactéries présentent dans les milieux hospitaliers. Ce phénomène aidera le bébé à bâtir son propre système immunitaire et certains chercheurs pensent que ça lui procurera, avec l’allaitement, une protection contre les allergies
Ensuite, il a été démontré que les bébés en peau à peau pleurent moins et souffrent moins lors des interventions comme les ponctions veineuses. La présence d’une personne réconfortante et la sensation physique du contact avec cette personne pourrait en partie expliquer ces phénomènes.

La naissance des premiers liens d’attachement

Au cours de la première heure et avant que la fatigue consécutive à l’accouchement ne l’assaille, la nouvelle maman, sous l’effet de l’adrénaline, est particulièrement réceptive à son bébé. Quant à lui, ses sens sont en éveil durant sa première heure de vie. C’est alors le moment idéal pour faire connaissance avec son bébé et pour le coller contre soi.
Le peau à peau déclenche également la production d’une hormone capitale : l’ocytocine, aussi appelée hormone de l’amour. C’est d’ailleurs l’hormone sécrétée lors des relations sexuelles et de l’orgasme. Lors du contact avec sa mère et/ou son père en peau à peau, il y a une sécrétion maximale d’ocytocine autant chez le bébé que chez les parents. On sait que cette hormone a le pouvoir étonnant de favoriser l’attachement. Donc on peut dire que le peau à peau favorise l’attachement. L’ocytocine vient donc renforcer de façon naturelle la magie de la naissance, de cette toute première rencontre entre les parents et leur bébé. Un moment d’échange intense, où le toucher joue un rôle essentiel dans la création des premiers liens.
Pour la maman et/ou le papa, tenir et porter souvent son enfant contre son corps lui permet d’apprendre plus vite à décoder ses besoins. Ça lui permet de partager du plaisir avec son enfant et lui procure le sentiment valorisant de vivre une belle expérience. 

L’allaitement

Du point de vue de l’allaitement, les bébés qu’on garde peau-à-peau avec leur mère immédiatement après la naissance durant au moins une heure sont plus aptes à prendre le sein sans aide et sont plus aptes à bien prendre le sein, particulièrement si la mère n’a reçu aucun médicament pendant le travail et la naissance.  Dans l’article Peau à Peau; un contact crucial pour le nouveau-né, on mentionne que le réflexe de succion est optimal au bout de quarante-cinq minutes environ après la naissance puis va décroissant pour s’interrompre dans les deux heures suivantes
Nous avons parlé plus tôt de l’ocytocine, cette fameuse hormone de l’attachement. En fait, cette hormone provoque aussi une augmentation de la température du sein. Grâce a cette différence de température, le nouveau-né peut repérer plus facilement le sein.

Il semblerait aussi que les bébés humains, reconnaissent l’odeur de leur mère. Les odeurs naturelles émanant du mamelon/aréole aident à guider le nouveau-né vers le mamelon. Dans la première heure après une naissance vaginale, il y aurait une augmentation de la noradrénaline qui joue un rôle dans l’apprentissage olfactif. Le bébé serait donc prêt physiologiquement à apprendre l’odeur du lait de sa mère, à condition bien sur d’être collé sur celle-ci. L’odeur du lait de maman aurait aussi un effet calmant sur le  bébé.

Une prise de conscience

Enfin le peau à peau va aussi permettre au bébé, pour la toute première fois, de prendre conscience de son propre corps. Il est soudainement libre de se mouvoir librement, lui qui, ces dernières semaines, évoluait dans un espace étroit ou il avait à peine la place de se retourner. Pendant l'accouchement, lorsque celui-ci est naturel, il a ressenti son corps pour la toute première fois: sa tête, ses bras, son ventre, par le peau à peau avec sa maman ou son papa, il le découvre plus en détail encore. 

Échange de chaleur, de sensations, d’émotions… Le peau à peau est un moment unique et intense de la naissance mais pas seulement. Car rien n’empêchent les parents de revivre cette rencontre avec leur bébé dès lors qu’ils le désirent, ou simplement, en ressentent le besoin, que ce soit les jours qui suivent à la maternité ou plus tard, à la maison. 

Conclusion

Pour terminer, le peau à peau est une méthode probablement utilisée depuis que le monde est monde et qui a facilité l’attachement des mères avec leurs petits depuis ce temps. Le peau à peau est la méthode naturelle par excellence pour favoriser une régularisation des signes vitaux du bébé à la naissance, favoriser l’allaitement, l’attachement parental et aider le bébé à découvrir le nouveau monde dans lequel il vient de naître. Je l’ai moi même utilisé lorsque mon fils avait des coliques ou encore lorsqu’il faisait de la fièvre et je peux vous confirmer que ça fonctionne. De plus, c’est le meilleur moyen que j’ai trouvé pour calmer mon petit et l’endormir tout contre moi avec l’aide d’un porte-bébé. Il n’y a, selon moi,  aucune raison de ne pas l’essayer.

Merci à Élaine d’avoir accepré de partager sa recherche. Si vous désirez lire le travail en entier, vous pouvez lui demander à l’adresse suivante : elaine_labrecque@hotmail.com
La bibliographie et les références sont disponibles dans la recherche  complète. 

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