Faire la paix avec sa naissance


J'ai visionné cette semaine le film What Babies Want (Ce que les bébés veulent). À mon avis, tous devraient voir ce film. Celui-ci parle de la conscience des bébés. J'ai vu ce film en compagnie de ma mère et de ma soeur, qui ont toutes deux beaucoup apprécié. Le film explore le concept par lequel un bébé est conscient de ce qui l'entoure dès la période de gestation, et comment tous les événements qui lui arrivent peuvent avoir un impact positif ou négatif sur sa vie future. Jusqu'à assez récemment on croyait que les bébés ne ressentaient rien, et n'avaient pas vraiment conscience de leur existence et de leurs émotions jusqu'à l'âge de deux ou trois ans environ, parce que notre mémoire consciente ne s'en souvient pas. Or, les événements négatifs comme une grossesse non désirée ou vécue difficilement, une naissance traumatique, un manque de contact avec la mère à la naissance, etc.,  ont un impact sur la vie future de l'enfant. Certains comportements à l'âge adulte peuvent être compris en examinant les conditions de la grossesse et de la naissance. Par exemple, dans ce film, un homme d'âge mûr raconte comment sa mère a failli lui donner naissance sur le bord d'une route, mais que dans la panique, son père à repoussé sa tête déja sortie à l'intérieur de sa mère, et a emmenée cette dernière dans un bâtiment proche pour la faire accoucher. Cet homme a vécu des patterns d'abandon et de rejet tout au long de sa vie, s'est senti comme si on ne voulait pas de lui, comme s'il était de trop. Il y a beaucoup, beaucoup de cas semblables où une situation à la naissance crée un pattern qui se répète ensuite tout au long de la vie, ou du moins jusqu'à ce que la mémoire soit ravivée et nettoyée. La bonne nouvelle, c'est qu'il est possible, dès le plus jeune âge, d'aller régler ces traumatismes pour éviter les effets négatifs sur la vie future de l'enfant. Même une fois à l'âge adulte, il n'est jamais trop tard pour aller régler ses mémoires de naissance.

Ce film propose une approche pour réparer ou contrer les séquelles. On voit entre autres une jeune maman parler à son très jeune bébé fille pour lui expliquer que les circonstances de sa naissance étaient hors de son contrôle, pour s'excuser de ne pas lui avoir donné naissance de la façon qu'elle aurait aimé. Elle lui raconte ce qui s'est réellement passé et pourquoi ça s'est passé comme ça, qu'elle l'avait  désirée et qu'elle était très heureuse de l'avoir à ses côtés, et qu'elle voulait qu'elle fasse la paix avec sa naissance et qu'elle n'en traîne pas de séquelles psychologiques et émotionnelles. Ce passage du film a beaucoup touché ma mère. Vous voyez, j'ai moi-même eu une naissance très difficile: 36 heures de travail actif, j'avais le bras allongé et le poing dans les airs pour rendre ça encore plus compliqué, et ma mère a eu une déchirure au quatrième degré. Elle a mit six mois à se remettre de son accouchement tellement ça a été éprouvant.

Ma mère a saisi l'importance de nous réconcilier toutes deux avec cet accouchement et les empreintes laissées par cette expérience douloureuse. Elle a compris que même si sa grossesse avait été facile, même j'étais une enfant désirée et  accueillie par des parents aimants, le déroulement et l'issue  de l'accouchement avait probablement laissé des séquelles sur moi. Je suis arrivée  dans ce monde en conquérante, vigoureuse et le poing levé, mais en la fracassant au passage.  Cet incident avait sans doute contribué à modeler mon attitude à l'égard d'autrui et à créer des doutes dans ma capacité à entrer adéquatement en relation avec les autres. 

 Elle a donc décidé de me parler comme la jeune maman l'a fait avec son bébé dans le film, de créer un moment de réconciliation. Elle m'a dit que si ma naissance a été si difficile, si elle a tant souffert, ce n'était pas de ma faute. En tant que nouveau-né, je me suis peut-être sentie très mal d'avoir autant fait souffrir ma mère, de l'avoir mise si mal en point.

Étonnamment, en grandissant, j'ai toujours eu cette retenue, cette peur de trop me rapprocher des autres, de peur de les blesser, cette peur de trop prendre ma place pour ne pas causer de problèmes. J'ai surtout toujours eu la crainte de contrarier ma mère, et si par mégarde elle devait être fâchée, triste ou dérangée à cause de moi, ça me mettait dans tous mes états. Ces paroles, et ce ''pardon'', si on peut user de l'expression, sont venues me chercher au plus profond de moi. En l'espace de quelques minutes, j'étais en larmes, comme si un fardeau avait disparu. Elle m'a ensuite prise par les épaules et m'a regardée droit dans les yeux en disant: «Tu sais, ce premier contact visuel et physique immédiatement après la naissance si important entre une mère et son nouveau-né, nous ne l'avons pas eu. J'étais si épuisée par mon accouchement qu'ils t'ont emmenée immédiatement ».  Deuxième vague de larmes, suivie d'un long câlin. À bien y réfléchir, j'ai toujours eu beaucoup de difficulté à soutenir un regard... peut-être qu'il y a un lien? En tout cas, qu'il y ait un lien ou pas, cette courte conversation entre ma mère et moi a été extrêmement bénéfique pour nous deux. C'était comme me libérer d'un fardeau dont je n'avait même  pas réalisé l'existence. Ça m'a aussi fait comprendre l'importance de faire la paix avec sa naissance, et qu'il n'est jamais trop tôt, ou trop tard pour le faire.


Merci Maman!


À la prochaine!

Comments

  1. Superbe billet, merci pour ton partage Laurie. C'est très important ce que tu dis!
    ;-) Aurélie

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